Comme tous les anciens métiers, les forgerons se sont organisés en corporation. L'exemple le plus vivant en sera les Compagnons des différents Devoirs de ce métier. Le travail de la forge s'est décliné en plusieurs métiers: maréchaux-ferrants, taillandiers, serruriers, ferroniers, tréfilleurs, cloutiers, couteliers... Tous indispensables et omniprésents des villes et villages d'antan dont le son des enclumes habitait le quotidien sonore. Les rivières de Franche-Comté était abondamment jalonnées de moulins actionnant martinets à pilonner le fer. Le millénaire qui a précédé notre Ere porte le nom d’Age du Fer, ce qui montre à quel point la place qu'à pu prendre le travail du fer pour cette civilisation. Cet Age du Fer est le temps de l'expension maximale de la civilisation celtique et les Celtes étaient experts en mettalurgie. Ceux-ci nous ont légué rituels et légendes associés à ce métier si particulier. A ce sujet, on ne pourra que conseiller la lecture du très célèbre ouvrage de Mircea Eliade « Forgerons et Alchimistes »,(Flammarion 1977). Encore une fois à la suite des charbonniers et des fendeurs nous mettons nos pas dans le contexte existentiel des anciens forgerons, Nous découvrons les gestes, accompagnés d'un imaginaire spécifique où se cotoient anges et démons, enfer et paradis... Nous écoutons les légendes celtiques de Goïbniou puis celles vaguement christianisées de Saint Eloi. Le poids des outils dans nos mains, au chant de l'enclume, entêtés par les volutes odorantes et acres, nous en pénétrons la magie, |
Ce nouvel ouvrage d`Annie Gay relate l`extraordinaire saga des Jobez alliés aux Monnier ou l`histoire d`une dynastie de maîtres de forges, emblématique du Jura durant le XVIIIe et le XIXe siècles. A l'origine, Grand Claude, serf et colporteur d'horloges, puis son petit-fils, Claude Etienne Jobez, l'acquéreur des forges de Baudin et de Syam. Au fil des générations, ils achetèrent bois, fourneaux et forges, installèrent laminoirs et fenderies, fonderies et clouteries, moulins et scieries. Ils furent maires, conseillers généraux et députés, sous la Révolution, l'Empire et les Bourbons. Ecrivains, philosophes, bibliophiles, poètes, inventeurs. Ils bâtirent écoles, chapelles et télégraphes. Ils édifièrent châteaux, rêves et la villa palladienne de Syam... Ils furent hommes d'affaires redoutables et politiques habiles, bâtisseurs énergiques et précurseurs d'idées. Puis, de grands notables, rentiers utopistes sur le déclin... Une aventure qu'Annie Gay reconstruit et raconte. "Des destins dont elle entrecroise les fils... Les Jobez et les Monnier, des héros balzaciens, de formidables types romanesques qui ne dépareraient pas une Comédie humaine", selon le journaliste et chroniqueur Robert Netz qui préface cet ouvrage.
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d'après rozsavolgyi. "Au temps de la Rome Antique -Eléments de Civilisation" chapitre IX - Des milliers d'ateliers |
Illustration proposée par un site intéressant, très pédagogique, sur les anciennes civilisations: http://rozsavolgyi.free.fr/cours/civilisations/civilisation%20romaine/rome%20antique/ Nous y trouvons annoté un schéma en coupe représentant un bas fourneau tel que nous tentons de le reconstruire lors de notre fête des vieux métiers (voir photos ci-dessus). Le bas fourneau est un four à combustion interne qui a servi, au début de l'âge du fer et jusqu'au Moyen Âge, à transformer le minerai de fer (hématite, limonite, etc.) en fer métallique par réduction directe. Historiquement, la réduction directe concerne l'obtention d'une "loupe" au bas du bas-fourneau (voir schéma). Ce procédé a été abandonné, au début du XXe siècle, au profit du haut-fourneau qui produit du fer en deux étapes (par réduction-fusion donnant la fonte, puis l'acier par affinage dans un convertisseur. (Sans aller plus loin dans la technique, ceci appelle les explications de quelqu'un de plus féru en sidérurgie à qui ses lignes sont ouvertes). La réduction du minerai de fer sans fusion est, historiquement, le procédé le plus ancien d'obtention de l'acier. En effet, les bas-fourneaux, incapables d'atteindre les températures de fusion des alliages de fer, produisent une "loupe", c,est à dire un agglomérat hétérogène de fer métallique plus ou moins imprégné de carbone, de gangue et de charbon de bois. Le secret des forgerons celtes de l'âge du fer est d'avoir tiré le meilleur parti de ces loupes ! "Loupe de fer" issue de bas-fourneau, image WIKIPEDIA article https://fr.wikipedia.org/wiki/Loupe_%28m%C3%A9tallurgie%29
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Ce livre est un classique du genre. Bien connu pour son œuvre d’historien des religions, Mircea Eliade a été fasciné toute sa vie par l’alchimie. C'est presque un prétexte que la forge y soit ici associée. L'alchimie symbolique pourrait ne rien à voir avec l'art de la forge. C'est un art, un genre à part entière qui se suffit à lui-même. Il y a toute une tradition autonome de l'alchimie et plusieurs écoles. Toutefois quand il s'agit de "travailler" les métaux pour "transformer le plomb en or", on rejoint ici le travail de la forge, notamment celui des aliages. Il en est ici comme en musique dont on dit qu'elle est l'art d'accomoder les sons. Mozart enfant aurait déclaré qu'"il y a des notes qui s'aiment". Et par conséquent d'autres qui ne s'aiment pas ou moins. Il en est de même pour les métaux. La connaissance des métaux qui s'aiment, qui se marient, qui s'allient, etc relève de la maitrise du forgeron. l'Age du Fer, en tant qu'âge des Celtes en souligne l'importance. Cette maîtrise est le fondement de cette civilisation. Il faudra croiser avec l'ouvrage de Régis Blanchet "Mystères et secrets des Forgerons" (présenté ci-avant) pour avoir une idée plus adaptée à nos préoccupations afin de pénétrer la portée initiatique du "grade" de forgeron en retrouvant l'environnement psychique d'un forgeron antique. On completera avantageusement ces lectures par le chapitre consacré aux forgerons par l'ethnologue Paul Sébillot (1843-1918) dans son ouvrage "Légendes et curiosités des métiers" paru en 1895 à l'époque où on pouvait encore recueillir des sources campagnardes. Ces ouvrages sont tous à l'inventaire de notre association et à disposition de nos membres. Il va sans dire que ce grade de Forgeron, est comparable à celui du Maître Maçon en franc-maçonnerie, ce dernier n'est-il pas d'ailleurs un bronzier ? " Que celui qui a des oreilles entende" jusqu'au mot de passe du grade murmuré à l'oreille: "T..." Le travail du forgeron est un travail d'alchimiste, lui-même travail de l'initié dont comme le dit notre rituel "il est le métal" à "travailler par le Diable et les Anges". 4ème de couverture: "L’alchimie s’enracine dans les croyances des sociétés traditionnelles, où les substances minérales revêtent un caractère sacré. Les minerais, tels des embryons, «croissent» dans le ventre de la Terre ; le fer issu des météorites a une dimension magique parce qu’il provient du ciel... En travaillant la matière, le forgeron, comme l’alchimiste, collabore au dessein secret de la Nature : il accomplit un rituel qui révèle le sens caché de l’univers. Explorant les mythes africains, grecs, indiens ou chinois, Eliade considère que l’expérience du sacré est universelle et constitutive de l’humain : elle est ce qui donne au monde sa signification. À cet égard, Forgerons et alchimistes constitue une excellente introduction à la pensée et aux travaux de ce grand érudit." image documentation EDF d'après édition de poche 'Champs-essais" Flammarion, 2018 |
Un ouvrage de Régis Blanchet, le fondateur de notre Ordre, le Rite Forestier des Modernes. Ce rite se caractérise par la présence d'un rituel d'initiatiion au grade de Forgeron. "Si une Vente forestière est bien composée de Fendeurs et de Charbonniers, le Cousin-Maître (Père-Maître), est incontestablement un Forgeron. Conformément à l'articulation des métiers ancestraux, le forgeron culmine dans les grades et niveaux et dirige la Vente; il est le grand coordinateur; il en est ainsi parce qu'un fendeur n'est pas un forgeron, parce qu'un charbonnier n'est pas un forgeron alors qu'un forgeron est nécessairement et préalablement un fendeur et un charbonnier. Un forgeron traditionnel est un homme, ou une femme, qui a commencé son éducation par une connaissance approfondie de la forêt, des essences des arbres et des vertus des plantes. A ce titre, dans les mémoires villageoises, il est aussi un peu médecin. Ensuite, il part vers la maîtrise du feu et de la carbonisation. Un forgeron qui ne connaîtrait pas toutes les natures de charbon issues des différentes essences de bois ne pourraît accomplir cetains travaux de forge. Son cursus attendu par sa communauté, aboutit ensuite à la forge, au travail de fondeur, de lingotier, de fendeur de fer et de ferronier, de taillandier et de maréchal ferrand, et de fabriquant de tous les objets métalliques utiles à son clan: houes, faux, socs, haches, épées, outils et ustensiles, objets de cultes, etc. Dès lors, il est l'homme fort du clan dans tous les sens du terme, l'"homo faber", le "Mac Fuirmid" et la position du Cousin Maître au sein d'une Vente forestière et tant que forgeron s'explique facilement." D'après Régis Blanchet in "Mystères et Secrets des Forgerons" pages 141/142
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